Une étude expérimentale menée par le laboratoire Laplace avec l’université de Californie à Los Angeles (UCLA) montre comment le mouvement de rotation d’un plasma peut entraîner la rotation de l’onde qui s’y propage. Ces résultats, qui permettent de mieux comprendre le couplage de moment angulaire entre une onde et un milieu en rotation, sont publiés dans la revue Physical Review Letters.
La propagation d’une onde lumineuse est modifiée par le mouvement du milieu dans lequel elle se propage. Le phénomène est connu depuis le 19e siècle, mais il est difficile à observer en raison de la différence d’échelle entre la vitesse de la lumière et celle du milieu en mouvement. C’est pourquoi, jusqu’ici, il n’avait pu être mis en évidence que dans des conditions très spécifiques où la vitesse de la lumière est artificiellement ralentie. Des chercheurs du Laboratoire plasma et conversion d’énergie (Laplace, CNRS/Toulouse INP/Université de Toulouse), en collaboration avec l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA), le Laboratoire de physique des 2 infinis – Irène Joliot-Curie (IJCLab, CNRS/Université de Paris-Saclay) et Princeton University, ont pour la première fois observé expérimentalement l’entraînement d’une onde par un milieu naturel en rotation, en produisant une rotation d’image dans un plasma.
Le phénomène est lié à la formation, dans les plasmas, de variations du champ magnétique qui prennent la forme d’ondes lentes. Ces ondes, dont l’existence avait été prédite par l’astrophysicien Hannes Alfvén au milieu du 20e siècle, ont été ensuite observées en laboratoire et dans l’espace.
Un plasma constitue donc un milieu propice à l’observation du phénomène d’entraînement d’une onde, à condition de pouvoir le mettre en mouvement. C’est ce qu’ont réussi les chercheurs, qui ont utilisé le Large Plasma Device (LAPD) de l’université de Californie à Los Angeles pour mettre un plasma en rotation, et y observer la rotation correspondante des ondes d’Alfvén. Le LAPD produit une colonne de plasma de 20 mètres de long et 75 centimètres de diamètre. Le dispositif mis en place pour cette étude s’est focalisé sur une section de cinq mètres de l’équipement. Aux extrémités, d’un côté, une antenne qui crée des perturbations magnétiques engendrant des ondes Alfvén, de l’autre, un jeu d’électrodes qui met le plasma en mouvement de manière contrôlée. Les paramètres du plasma et de l’onde sont mesurés en plusieurs points de la section de la colonne.
Le phénomène observé est une rotation de la structure transverse de l’onde (son profil d’amplitude dans le plan perpendiculaire à la direction de propagation), sous l’effet de la rotation du plasma qu’elle traverse. L’équivalent, si l’on utilisait des ondes dans le domaine visible, de la rotation d’une image (voir illustration).
Ces études pourraient ouvrir la voie à de nouveaux instruments pour sonder la matière à distance, que ce soit en astrophysique ou pour l’étude de la fusion nucléaire. Elles permettent aussi, sur le plan fondamental, de mieux comprendre le couplage de moment angulaire entre une onde et un milieu en rotation. De nouvelles expérimentations sont prévues au LAPD, afin d’étudier d’autres effets du mouvement du plasma sur la propagation des ondes d’Alfvén.

Références
Image Rotation in Plasmas.
Renaud Gueroult, Shreekrishna Tripathi, Jia Han, and Patrick Pribyl, Jean-Marcel Rax, Nathaniel J. Fisch.
Physical Review Letters, publié le 17 juin 2025.
https://doi.org/10.1103/swrn-w3yf
Article disponible sur la base d’archives ouvertes Arxiv
Contact
Renaud Gueroult
Chargé de recherche CNRS au Laboratoire plasma et conversion d’énergie (Laplace, CNRS/Toulouse INP/Université de Toulouse)
renaud.gueroult@laplace.univ-tlse.fr