Modélisation physique de la délivrance transdermique électrostimulée de médicaments

La soutenance de thèse de Yorgos KOUGKOLOS, intitulée « Modélisation physique de la délivrance transdermique électrostimulée de médicaments » et dirigée par Dr Emmanuel FLAHAUT (CIRIMAT) et Dr Zarel VALDEZ-NAVA (LAPLACE), s’est déroulée le mercredi 6 décembre à 10h, à l’amphi Concorde (Campus Paul Sabatier).

Jury :

Mme Marie FRENEA ROBIN Rapporteure
M. Antoni IVORRA Rapporteur
Mme Sylvie DAGREOU Examinatrice
M. Christophe VIEU Examinateur
M. Emmanuel FLAHAUT Directeur de thèse
M. Zarel VALDEZ-NAVA Co-directeur de thèse
Mme Muriel GOLZIO Membre invité
M. Lionel LAUDEBAT Membre invité

 Résumé:

L’électroporation de la peau pour l’administration transdermique de médicaments comprend l’application de champs électriques pulsés (PEF) sur la peau pour perturber sa fonction de barrière de manière temporaire et non invasive, augmentant ainsi l’absorption des médicaments. Elle représente une alternative potentielle aux méthodes d’administration conventionnelles qui sont invasives (par exemple les injections) ou limitées (les médicaments pris par voie orale subissent un métabolisme de premier passage). Parmi ses avantages, on note une biodisponibilité accrue, des concentrations sanguines stables et soutenues, une auto-administration indolore et une réduction de la fréquence des prises, ce qui améliore le respect de la prescription par le patient et donc sa qualité de vie.

Nous avons mis au point un système d’administration de médicaments par hydrogel nanocomposite en combinant le polymère d’agarose hydrophile et biocompatible avec des nanotubes de carbone biparois conducteurs d’électricité. L’hydrogel a servi de réservoir pour le médicament et d’électrode conductrice pour l’application d’impulsions électriques sur la peau. Les hydrogels ont été séchés à l’air puis gonflés dans une solution aqueuse avec une molécule d’intérêt, absorbant 2,7 fois leur masse sèche. L’incorporation de nanotubes de carbone dans les hydrogels d’agarose a augmenté leur conductivité électrique de deux ordres de grandeur. En parallèle, nous avons testé l’impact de nombreux paramètres (concentration en nanomatériaux, méthode de traitement, agent dispersant, polymère) sur le taux de gonflement et la conductivité électrique des hydrogels.

Nous avons utilisé une approche multi-échelle pour étudier le système d’administration de médicaments sur un modèle de peau de souris, au travers de mesures électriques, de la modélisation numérique et de la microscopie à fluorescence. Les propriétés électriques ont révélé un comportement électrique fortement non linéaire de la peau. La résistance moyenne de la peau diminue avec l’augmentation de la tension appliquée, et la résistance instantanée diminue pendant l’application des impulsions électriques. Les mesures de courant et de tension ont été utilisées pour étudier la récupération de la peau après l’électroporation et pour valider le modèle numérique. La simulation de la distribution du champ électrique dans la peau a permis de calculer des intensités de champ électrique dans la gamme de l’électroporation tissulaire réversible (400-1200 V/cm) dans les couches de peau viables, pour des PEF de 300 V. La microscopie à fluorescence a révélé une absorption accrue de molécules fluorescentes (utilisées comme modèles de médicaments) par rapport au contrôle non pulsé. Nous avons observé trois domaines d’effets des PEF sur la peau : (1) dès 50 V PEF, des voies conductrices se sont formées à travers l’épiderme, diminuant la résistance de la peau, (2) à 100 V PEF, les premières régions de transport local sont apparues dans les lipides extracellulaires de la couche cornée, (2) à 100 V PEF, les premières régions de transport local sont apparues dans les lipides extracellulaires de la couche cornée, démontrées par une marquage accrue de Lucifer Yellow, un petit fluorophore hydrophile et (3) à 300 V PEF, la première perméabilisation des cellules nucléées s’est produite, démontrée par la fluorescence accrue de l’iodure de propidium, un agent d’intercalation de l’ADN imperméable à la membrane.